lundi 9 avril 2007

rufus, mon amour ! # 2

mon beau rufus... encore un beau souvenir... l'interview qu'il m'accorda le 12 novembre 2003 dans un petit salon d'un grand hôtel parisien après une nuit de vadrouille (il était épuisé) pour, "gorgeous & terrific", le fanzine des popingays, mon ancienne assoc'...
En trois albums mélancoliques et un peu drama-queen, Rufus Wainwright s’est fait une place à part dans le coeur de nombre de garçons sensibles. Revisitant le patrimoine musical gay américain, ce « fils de son père » est en passe de devenir une icône gay et pop. A l’occasion de son passage à Paris pour la promotion de son nouvel album Want one, nous nous devions donc de le rencontrer.

Ta famille est très présente dans tes chansons.

Oui, depuis tout gosse, nous avons chanté ensemble : ma mère, mon père, ma tante, ma sœur. J’ai vu le côté de l’industrie du disque où il faut vraiment travailler beaucoup pour gagner très peu d’argent. Comme on n’avait pas beaucoup d’argent quand j’étais petit, il fallait toujours que mes parents travaillent dans la musique. J’ai toujours été très conscient de ça, alors je tiens à partager mon succès, la reconnaissance et aussi l’argent avec eux... Pour être gentil (rires). On est plus forts ensemble que séparément.

J’ai entendu dire que je tu voulais faire un disque en français.

Oui, j’aimerais beaucoup. Je suis en train d’aménager mon répertoire, sur scène : j’interprète de vieilles chansons d’Arletty ou de Joséphine Baker et aussi de vielles chansons folkloriques québecquoises que j’adore.

Quelles sont tes influences ?

J’ai grandi dans un milieu très marqué par le folklore québécois. On chantait beaucoup de chansons traditionnelles québécoises et irlandaises. Très jeune, j’ai découvert les vieilles comédies musicales américaines : j’adorais Annie, Oliver, Le Magicien d’Oz, les chansons de Cole Porter et tout ça. Mais à 14 ans, au cours d’une soirée, j’ai entendu le Requiem de Verdi et ça m’a complètement chamboulé. J’étais submergé, enchaîné un peu, et le tout en une soirée. La veille je n’aimais pas du tout l’opéra et tout d’un coup j’étais fan. Après, c’est surtout l’opéra que j’ai écouté. C’est mon style préféré. J’aime aussi beaucoup les lieder de Schubert. Il y a même parfois là-dedans des moments plus riches que des opéras de 6 heures.

Et dans les musiques d’aujourd’hui ?

Pas grand chose. J’aime Radiohead des fois, Beth Orthon, Chicks On Speed... Je suis assez varié, mais c’est surtout quand je sors, quand je suis dans des fêtes... je n’aime pas écouter de l’opéra au bar. Je n’écoute pas beaucoup de musiques actuelles mais je suis ouvert. J’aime écouter ce que les autres écoutent...

Pourquoi une armure sur la couverture du dernier album ?

Ça c’était vraiment pour des raisons personnelles et publiques... Il y a deux raisons : la première c’est que je me suis rendu compte que beaucoup de ces anciennes fables et contes que j’ai entendus et aimés enfant, sont vraiment revenus me hanter dans ma vie quotidienne, parce que pour beaucoup des batailles que j’ai dû livrer, il fallait vraiment que j’aie la mentalité d’un chevalier. Les batailles contre la drogue, la dépression, ou simplement la vie moderne. J’ai aussi dû m’inspirer d’anciennes valeurs pour trouver du sens à la vie, surtout après le 11 septembre. L’autre raison est esthétique, j’aime beaucoup les artistes pré-raphaëliques comme Edward Burn-Jones et Millet. J’aime beaucoup Millet... Alors j’ai un peu imité ce style là. Le plus drôle, c’est que je me suis rendu compte que mon style musical aussi est pré-raphaëlique. J’ai un peu introduit le style ancien. Un peu maniériste.

Qu’est ce que ça t’a fait quand Dave Douglas a interprété Poses ?

Je n’ai pas encore écouté... C’est bien ? Je vais me le procurer.

Ne serais-tu pas attiré par la forme jazz ?

J’aimerais faire ça oui. Mais je pense que pour les chanteurs pop c’est une sorte de piège, comme pour Deborah Harry, Rod Steward, Sinead O’Connor, Björk... Je ne suis pas très fan de leurs disques jazz. J’aimerais en faire un mais peut-être après un disque en français, ou folklorique. J’ai participé au disque hommage à Harold Arlen... Je peux le faire... Il y a beaucoup de choses que je pourrais faire, comme un disque de jazz... Je le ferai un jour mais pour le moment je veux faire des choses dont je ne suis pas encore sûr d’être capable. Je n’ai pas de plan de carrière.

On t’a vu dans Ab’ fab’ et tu as participé à plusieurs musiques de films... ne serais-tu pas tenté par une carrière au cinéma ?

Si, je suis dans un film de Scorsese qui va bientôt sortir, sur la vie de Howard Hughes, The Aviator. J’interprète un chanteur de jazz... Encore le jazz, c’est le jazz qui me suit, ce n’est pas moi qui suis le jazz... J’y chante une chanson de Gershwin. Et à mon retour à New York, je fais un film avec Glenn Close. Ça vient...

Qu’aimes-tu comme cinéma ?

Je suis un peu snob ! J’aime Happiness, Fellini, Truffaut, Bunuel et Almodovar. J’aime tout ce qui est bon.

Penses-tu être, ou devenir, une icône gay ?

Je suis une icône gay. Ce n’est pas de mon fait. Mais je suis le premier musicien à commencer ma carrière out et à la garder. Alors oui, que je le veuille ou non, c’est comme ça, on en parle, et je suis dans les magazines gays, vous ne pouvez pas m’éviter.

Tu as écrit avec Elton John une chanson sur l’affaire Matthew Sheppard. N’as-tu pas pensé à écrire quelque chose toi-même sur le sujet ?

Non, cette histoire m’a bouleversé mais je n’écris pas de chansons sur des thèmes spécifiques. Ou alors parfois au détour d’un vers. Mais mes chansons ne sont pas spécifiquement gay.

Mais de plus en plus précises, comme sur Gay Messiaeh...

N’importe qui pourrait les chanter. Je ne veux pas être étiqueté.

Est-ce que tu chantes pour tes amants ?

S’ils sont loin et que je veux qu’ils se rapprochent... En dernier recours, j’utilise ma voix comme une arme secrète...

Ta famille est très présente... mais pas ton compagnon....

Il y a eu Danny Boy sur le premier album... mais je n’ai pas encore rencontré mon mari....

Y aura-t-il d’autres concerts sur paris ?

Je pense que oui. Je suis en transe quand je chante... mais pas quand je parle français... Je ne suis pas venu depuis des années parce que mon manager, qui est également celui de Moby, voulait me faire connaître du public américain, alors j’ai tourné et tourné. Pour Paris, c’était plus un concert pour la presse. Il voulait lancer l’album comme un bateau, d’où le Batofar.

Comment procèdes-tu pour travailler ?

Ca fait tellement longtemps que je pratique que c’en est devenu naturel. Je mange, je compose, je vais aux toilettes, je marche. Je suis toujours en train d’écrire. Je suis toujours dans un processus de créativité. Je suis devenu comme une machine... Quand je suis déprimé ou triste, ce qui arrive souvent, la seule façon d’en sortir c’est d’écrire quelque chose. C’est un peu comme un cercle vicieux. On imagine souvent que c’est amusant d’être musicien ou artiste. Mais à mon avis, c’est un peu l’enfer. On se nourrit de ses émotions les plus sombres.

Et pour la voix ?

Je la travaille tous les jours. Au moins deux heures par jour au piano. Je dois répéter les vers de mes chansons. Je dois appeler mon téléphone portable d’un téléphone public pour me chanter la chanson à moi-même...

Tes projets pour les mois à venir ?

La promotion de Want one & two (qui sortira début 2004). Je ne veux pas dire que c’est mon dernier essai, mais je vais vraiment mettre toute mon énergie dans ce projet. Après je ferai d’autres choses, peut-être des disques plus intimes, des pièces de théâtre, des arts plastiques, de la comédie.

J’ai lu que tu pourrais arrêter.

Ça se peut... Peut être...

Tu viens souvent à paris ?

Des fois... J’ai l’impression qu’ils m’aiment ici, je vais venir plus souvent...





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